
Ultra-trail et hypertension : courir l'UTMB sans se mettre en danger
Le week-end dernier, l'UTMB 2025 a sacré Tom Evans et Ruth Croft sous un ciel froid et changeant. L'envie de s'aligner en 2026 vous démange. Bonne idée si vous avez une hypertension ? Oui, à condition de cadrer le risque. Voici le plan clair pour préparer, partir, et rentrer sans casse.
L'essentiel en 6 lignes
- Ne prenez pas le départ si votre tension au repos dépasse 180/110 mmHg. Faites traiter d'abord.
- Mesurez chez vous la semaine de course : matin et soir, et le matin du départ. Notez la moyenne.
- Hydratez à la soif, pas au litre imposé. Le trop-plein d'eau fait chuter le sodium et peut devenir dangereux.
- Diurétiques : prudence en ultra. Déshydratation et hyponatrémie plus probables. Parlez-en à votre médecin en amont.
- Évitez l'ibuprofène en course. Le risque d'atteinte rénale monte nettement en ultra-endurance.
- Froid, altitude, nuit blanche : combo classique à l'UTMB. Votre tension peut osciller. Anticipez, pas d'impro.
UTMB 2025 en deux chiffres
Parcours mythique autour du Mont-Blanc, ~171-173 km et ~10 000m D+. Victoires 2025 : Tom Evans en 19 h 18 min 58 s, Ruth Croft chez les femmes, sur une édition froide et humide qui a bousculé les favoris. Leçon du week-end : l'ultra récompense la préparation fine et la gestion médicale carrée.
Hypertension et effort très long : les vraies règles du jeu
Seuils avant de courir
- Au repos, > 180/110 mmHg : pas de compétition. Faites baisser sous contrôle médical avant toute inscription.
- Hypertension traitée et stabilisée : l'ultra reste possible si vous tolérez bien les sorties longues et si le bilan cardio est OK. Reprenez progressivement l'intensité.
Pourquoi ces seuils
Au-delà, l'effort prolonge la contrainte sur le cœur et les artères. Les sociétés savantes de cardiologie placent ce niveau comme ligne rouge pour le sport compétitif, en attendant un contrôle.
Votre protocole "semaine UTMB" avec un tensiomètre bras
- J-7 à J-3 : trois mesures le matin, trois le soir pendant trois jours. Faites la moyenne.
- J-2 / J-1 : une mesure le matin, une le soir. Hydratez normalement.
- Jour J, au réveil : une mesure. Si la moyenne des trois jours est ≤ 135/85 mmHg et que vous vous sentez bien, feu vert. Si vous voyez un bond inhabituel de +10 mmHg ou plus, discutez avec l'équipe médicale de course.
Astuce : même brassard, même bras, cinq minutes assis avant d'appuyer.
Boire et saler intelligemment
Hydratez à la soif
Les guides de médecine de montagne sont clairs : boire “par obligation” favorise l'hyponatrémie d'effort. Buvez quand la soif apparaît. Alternez eau et boisson salée si vous êtes lent ou s'il fait froid. Surveillez les maux de tête qui ne cèdent pas et les nausées persistantes.
Sel et tension
Un peu de sel en ultra compense la sudation, surtout si vous transpirez salé. Mais n'augmentez pas massivement vos apports si vous êtes hypertendu. Visez la régularité, pas la surenchère.
Médicaments et ravitos : ce qu'on ajuste
- Diurétiques : discutons leur horaire ou un relais temporaire avec votre médecin. Le risque : chute de sodium et déshydratation, surtout la nuit froide.
- IEC/ARA2, bêtabloquants : souvent compatibles si votre cardiologue valide l'effort. Écoutez la fatigue anormale et les étourdissements.
- Anti-douleurs : pas d'ibuprofène en course. Des études en ultra montrent plus d'atteintes rénales sous AINS. Restez sur la stratégie "prévention des bobos" : rythme, chaleur, friction maîtrisée.
Froid, altitude, nuit blanche : trio qui bouscule la tension
En 2025, la météo a alterné brouillard, vent et éclaircies. Le froid et l'altitude raidissent les vaisseaux et font varier la pression. Ajoutez la privation de sommeil, et la fréquence cardiaque devient plus capricieuse. Adaptez couches, gants, bonnet. Prenez le temps de souffler au ravito. Votre tension aime la constance, pas les à-coups.
Feu vert / feu orange / feu rouge le matin du départ
- Vert : vous êtes dans vos chiffres habituels, pas de céphalée, pas d'œdèmes.
- Orange : +10 mmHg vs votre moyenne, maux de tête, jambes lourdes. Parlez au médecin de course. Partez prudemment et réévaluez à Contamines.
- Rouge : ≥ 180/110 mmHg, douleur thoracique, essoufflement inhabituel. Pas de départ. Ce n'est pas votre édition.
Trois signaux d'arrêt à respecter pendant la course
- Céphalée qui s'aggrave + nausée + confusion après avoir beaucoup bu : risque d'hyponatrémie. Stop, ravito médical.
- Crampes diffuses + urines très foncées + douleur lombaire : attention reins, surtout si AINS pris en amont. Arrêtez et consultez. 
- Bourdonnements + vision qui se rétrécit + tension qui explose au point de contrôle : on rend le dossard, on se protège pour la suite de la saison.
Après l'arrivée : récup intelligente
- Buvez par petites gorgées. Salez normalement vos repas.
- Surveillez les urines : claires en 24 h. Sinon, avis médical.
- Mesurez votre tension matin et soir 3 jours. Un palier inhabituel se corrige souvent avec repos et réhydratation.
FAQ express
Caféine et gels "boost"
OK en petites doses si vous la tolérez. Évitez l'accumulation tardive de nuit. Les pics de caféine isolés peuvent faire monter la pression à court terme.
Faut-il un oxymètre ?
Pas indispensable, mais utile si vous savez qu'au-dessus de 2 000 m vous désaturez vite. Prenez la mesure au chaud, au repos.
Je vise la CCC d'abord, puis l'UTMB
Parfait pour tester votre protocole tension et ravitos. La CCC reste longue, mais vous dormez avant minuit.
L'UTMB fait rêver parce qu'il exige le meilleur de nous. L'hypertension n'empêche pas ce rêve, elle impose simplement une méthode. Des chiffres propres, une hydratation juste, des choix lucides. Vous ne jouez pas votre santé au dé, vous l'emmenez au sommet. Rendez-vous sur les sentiers quand la montagne blanchira.